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Pierre-François de Médicis, fils de Lorenzo et petit-neveu de Lorenzo, frère de Cosme ; et sa mère, madame Marie, fille de Thomas Soderini, fils de Paul-Antoine. Cette femme, d’une rare prudence et bonté, ayant perdu son mari quand Lorenzo était encore en bas âge, fit élever cet enfant avec tous les soins imaginables. Lorenzo manifesta une intelligence incroyable dans ses études ; mais à peine fut-il sorti de la tutelle de sa mère et de ses maîtres, qu’il commença à montrer un esprit inquiet, insatiable, et désireux de mal faire. Après avoir pris des leçons de Philippe Strozzi, il se mit à se railler ouvertement de toutes les choses divines et humaines. Au lieu de rechercher ses égaux, il se lia de préférence avec des gens au-dessous de lui et qui non seulement lui témoignaient du respect, mais se faisaient ses âmes damnées. Il se passait toutes ses envies, surtout en affaires d’amour, sans égard pour le sexe, l’âge et la condition des personnes. Il caressait tout le monde, et, au fond, méprisait tous les hommes. Son appétit de célébrité était étrange, et il ne laissait pas échapper une seule occasion, tant en actions qu’en paroles, d’acquérir la réputation d’homme galant ou spirituel. Comme il était délicat et maigre de corps, on l’appelait Lorenzino. Il ne riait point, et souriait seulement. Bien qu’il fût plutôt agréable que beau, ayant le visage brun et l’air mélancolique, il plut cependant beaucoup, dans sa petite jeunesse, au pape Clément, ce qui ne l’empêcha point, comme il l’a dit lui-même après la mort du duc Alexandre, de concevoir la pensée de tuer le saint-père. Il conduisit François, fils de Raphaël de Médicis, compétiteur du pape, jeune homme instruit et de grande espérance, à un tel état de ruine, que ce malheureux, devenu la fable de la cour de Rome, fut considéré comme fou et renvoyé à Florence. Dans le même temps, Lorenzo encourut la disgrâce du pape et