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Pierre.

Un bon coup de lancette guérit tous les maux.

Philippe.

Guérir ! guérir ! Savez-vous que le plus petit coup de lancette doit être donné par le médecin ? Savez-vous qu’il faut une expérience longue comme la vie, et une science grande comme le monde, pour tirer du bras d’un malade une goutte de sang ? N’étais-je pas offensé aussi, la nuit dernière, lorsque tu avais mis ton épée nue sous ton manteau ? Ne suis-je pas le père de ma Louise, comme tu es son frère ? N’était-ce pas une juste vengeance ? Et cependant sais-tu ce qu’elle m’a coûté ? Ah ! les pères savent cela, mais non les enfants. Si tu es père un jour, nous en parlerons.

Pierre.

Vous qui savez aimer, vous devriez savoir haïr.

Philippe.

Qu’ont donc fait à Dieu ces Pazzi ? Ils invitent leurs amis à venir conspirer, comme on invite à jouer aux dés, et les amis, en entrant dans leur cour, glissent dans le sang de leurs grands-pères[1]. Quelle soif ont donc leurs épées ? Que voulez-vous donc, que voulez-vous ?

Pierre.

Et pourquoi vous démentir vous-même ? Ne vous ai-je pas entendu cent fois dire ce que nous disons ?

  1. Voir la conspiration des Pazzi. (Note de l’auteur.)