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deux êtres, dont l’accord eût été si utile, allèrent ainsi se brouillant et se réconciliant jusqu’au départ de Rachel pour l’Amérique.

À l’occasion des débuts de Pauline Garcia, Alfred de Musset publia deux morceaux de critique, réimprimés pour la première fois dans cette édition. Le premier était accompagné d’une pièce de vers qu’on en a détachée pour l’insérer parmi les poésies, mais qui gagne beaucoup à être rétablie dans le cadre où l’auteur l’avait placée. Le second contient une dissertation remarquable sur l’Othello de Shakspeare comparé à celui de Rossini. Des relations amicales s’ensuivirent entre le poète et Desdemona ; mais malgré les efforts d’un petit nombre de gens de goût, le public donna quelques signes de refroidissement pour la jeune cantatrice, qui prit la résolution d’aller chercher fortune dans les pays étrangers. Rachel était alors dans un de ses accès d’ingratitude pour son défenseur. Alfred de Musset ne se vit pas sans tristesse oublié de ces deux artistes dont il avait salué les premiers succès avec tant de joie et d’enthousiasme. Il n’y a pas loin de l’admiration à l’amour dans le cœur d’un poète de vingt-huit ans ; et l’on ne risque guère de se tromper en supposant qu’il les aimait toutes deux ; mais ce qu’il aimait surtout en elles, c’était le feu divin, et de cet amour-là il aurait pu brûler pour dix personnes à la fois. J’ai quelques raisons de croire que les vers intitulés Adieu s’adressaient, dans la pensée de l’auteur, à Desdemona partant pour l’Angleterre ou la Russie.

D’un côté, les belles illusions s’envolaient ; d’un autre côté arrivèrent des soucis d’une réalité incontestable. Par suite de la détermination qu’il avait prise de laisser reposer