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je m’en vais voir Norma dimanche dernier, chose assez naturelle. Or, j’avais pris la stalle du balcon no 25. Pourquoi ? — Parce que c’est la dernière au coin, et que, dans la loge à côté, je comptais trouver quelqu’un que vous ne connaissez pas. J’arrive à huit heures sonnant, tout embaufumé, et je trouve dans la stalle no 24, c’est-à-dire à côté de moi, une fille entretenue, ancienne maîtresse d’un de mes amis. Elle m’adresse la parole. Impossible de ne pas répondre, en sorte que, pour le public, me voilà installé tranquillement au beau milieu du balcon des Bouffes avec une donzelle. Je me donnais au diable ; on me lançait, ou plutôt on me laissait tomber des regards d’un mépris ! — Je m’en suis allé, et j’ai planté tout là, selon ma louable coutume.

Deuxième carambolage. Hier mardi, je suis allé voir la Linda di Chamouny. Il y a de jolies choses. Cela vaut la peine d’être entendu de vous. J’aime la Brambilla, quoiqu’elle ait le plus gros postérieur du monde dans sa culotte de Savoyard. — Je m’adresse, en arrivant, à un marchand de billets qui m’en vend un. La comtesse de*** avait vendu sa loge. Il se trouve que c’est dans celle-là qu’on me donne une place. J’entre à l’avant-scène donc, et j’aperçois en face de moi Belgiojoso qui me braque d’un air étonné. Ce n’était pas pour me voir qu’il était venu là. (En face de moi, par parenthèse, était aussi l’ingrate Pauline). Pendant l’entr’acte, Belgiojoso m’aborde dans le corridor. Nous