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On ouvre, — qui vient là ? — C’est vous, mon cher Mécène !
Et d’où venez-vous donc, que l’on vous voit à peine ?
D’oublier l’empereur, sans doute à vous permis,
Et le monde et le temps ; mais non pas vos amis.

Mécène.

César, que Jupiter vous protège et vous aide !
Que l’univers, soumis, à vos volontés cède,
Et que votre fortune, à toute heure, en tout lieu…

Auguste.

Asseyez-vous. — Je sais que je dois être un dieu.
On dit que vos jardins sont un petit Parnasse,
Et que votre falerne a fait les vers d’Horace.
Que dit-il ? que fait-il ?

Mécène.

Que dit-il ? que fait-il ? Il va toujours rêvant ;
Conduit par son caprice, il marche en le suivant.

Auguste.

Et Virgile ?

Mécène.

Et Virgile ? Toujours fidèle à son génie,
Son immortelle voix n’est plus qu’une harmonie,
Et, pour nous dire un mot, sans vouloir dire mieux,
Il ne sait plus parler que la langue des dieux.

Auguste.

Vous les aimez, Mécène ?

Mécène.

Vous les aimez, Mécène ? Oui, seigneur, je confesse
Que la muse est pour moi la grande enchanteresse,