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Et lorsqu’il arriva, son épée à la main,
À peine savait-on qu’il était en chemin.
Lorsqu’on demande avis, qu’on doute, qu’on hésite,
Sur le bien qu’on poursuit, sur le mal qu’on évite,
Est-ce Auguste qui parle ? ou par quel changement
Est-ce ainsi, devant lui, qu’on parle impunément ?
En vous écoutant dire, ou je me suis méprise,
Ou vous avez au cœur quelque vaste entreprise.
Ce dessein, quel qu’il soit, m’est sans doute inconnu,
Mais l’ennui qui vous tient de là vous est venu.
Depuis quand, dites-moi, le maître de la terre
A-t-il donc condamné sa pensée à se taire ?
Devant quelle fortune ou quelle adversité
Le neveu de César a-t-il donc hésité ?
Est-ce aux champs de Modène ? Est-ce aux murs de Pérouse ?
Est-ce quand Marc-Antoine, avec sa noire épouse,
Fuyait épouvanté, par notre aigle abattu,
Ou quand Brutus mourant reniait la vertu ?
Quand le jeune César (c’est ainsi qu’on vous nomme)
Autrement qu’en triomphe est-il entré dans Rome ?
Pour combattre aujourd’hui vous n’osez en sortir,
À moins que vos rhéteurs n’y daignent consentir !
Que ne demandez-vous le conseil d’un esclave ?
Souvenez-vous, seigneur, souvenez-vous, Octave.
N’est-ce rien que ces chants, ces rameaux de laurier,
Un seul nom dans la voix d’un peuple tout entier ?
Rappelez-vous ces jours qui furent vos délices,
Les autels tout couverts du sang des sacrifices,