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du 4e corps de la grande armée, avec laquelle il combattit aux journées de Lutzen et de Bautzen. Presque immédiatement il reçut l’ordre de se rendre à Bayonne pour y réorganiser l’armée du Midi que la défaite de Vittoria avait entièrement démoralisée ; il réussit dans cette entreprise difficile, de manière à dépasser les espérances de l’Empereur ; cette armée sans chefs, sans discipline, ou plutôt ces débris épars sont réorganisés avec cette merveilleuse facilité qu’il possède à un si haut degré ; il se retourne alors contre l’ennemi marchant vers nos frontières, soutient l’honneur de nos armes à Orthez, à Aire, à Vic de Bigorre, à Tarbes, et livre enfin, le 10 avril 1814, cette mémorable bataille de Toulouse, dernier et glorieux coup de canon tiré pour la défense du sol envahi, et dont les circonstances seules vinrent arrêter les résultats.

Il est bien reconnu maintenant que si le maréchal Suchet eût voulu se réunir au maréchal Soult avant la bataille de Toulouse, en 1814, l’armée anglaise eût été taillée en pièces sous les murs de cette ville, et que lord Wellington eût été dessaisi des résultats que ses armes avaient obtenus… Le duc de Dalmatie, sentant toute l’importance de cette réunion, écrivait à son collègue : « Si vous ne voulez pas être sous mon commandement, je me placerai sous le vôtre. Ne faites que paraître, vos troupes resteront, si vous voulez, l’arme au bras ; qu’elles paraissent seulement, le succès est assuré. » Le duc d’Albuféra ne fit aucun mouvement.

Le gouvernement de la première Restauration nomma le duc de Dalmatie gouverneur de la 13e division militaire le 21 juin 1814, puis ministre de la guerre le 3 décembre, poste qu’il occupait lorsque Napoléon débarqua de l’île d’Elbe ; comme chef de l’armée, il adressa aux troupes une proclamation qui n’empêcha pas l’Empereur de l’appeler aux Tuileries le 25 mars, et de lui confier, le 9 mai 1815, les fonctions de major-général de l’armée ; à la funeste journée de Waterloo, lorsque Napoléon, à la vue du désastre de nos armes, voulait se précipiter au milieu des baïonnettes, Soult, resté à ses côtés jusqu’au dernier moment, parvint, en saisissant la bride de son cheval, à l’entraîner sur la route de Charleroi.

Ici finit la carrière militaire du maréchal : il en est peu qui resplendissent d’un pareil éclat. Dans cette existence de près de trente années de combats, il déploya sur les principaux champs de bataille de l’Europe les plus beaux talents militaires, et ces rares et éminentes facultés qui font les grands hommes de guerre.

Après la seconde Restauration, compris dans l’ordonnance d’exil du 24 juillet, et rayé de la liste des maréchaux le 27 décembre 1815, il resta en exil jusqu’en 1819, et fut réintégré par Louis XVIII dans la dignité de maréchal en 1820 ; le roi Charles X l’éleva à la Pairie.

La Révolution de 1830 appela le maréchal Soult à rendre de nouveaux services à son pays. Les événements pouvaient faire craindre une collision entre la France et plusieurs des grandes puissances de l’Europe ; une longue paix avait amoindri nos forces militaires. La main ferme et puissante du maréchal était seule capable d’imprimer à la réorganisation de notre armée cette impulsion prompte et énergique qu’exigeait la situation. — Placé dès le mois de novembre 1830 à la tête du département de la guerre, il déploya une activité presque incroyable ; quelques mois à peine s’étaient écoulés, et une armée de 400.000 hommes, armés, équipés et formés à la discipline, était prête à repousser l’étranger.

En 1834, lorsque la sanglante insurrection du mois d’avril éclata, le maréchal Soult reçut du