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il s’était assuré que les Autrichiens n’avaient aucune notion certaine sur notre marche, qu’ils ne nous croyaient pas même réunis en corps d’armée.

« Ces aperçus ne tardèrent pas à se vérifier. Le quatrième corps avait enlevé Donawerth sans résistance, et le sixième avait fait son mouvement le long du fleuve, sans qu’aucun incident fâcheux eût signalé sa marche, lorsqu’il reçut ordre de prendre position. Soult s’était avancé le 6 sur la place ; il n’avait aperçu, comme l’avait annoncé le maréchal, que quelques partis de cavalerie qui n’avaient pas essayé de s’engager. Il avait précipité son mouvement et était arrivé, après une traite de quinze heures, devant le pont qu’il devait enlever. Ses voltigeurs s’étaient élancés sur les travées que les Autrichiens livraient aux flammes, et le fleuve avait été franchi.

« L’ennemi se replia sur le Lech, on le suivit, on s’avança sur Neubourg ; mais l’Empereur, auquel on annonçait de toutes parts qu’il se concentrait sur cette place, se persuada qu’il avait abandonné le Michelsberg et résolut d’emporter Ulm. Il chargea Ney de l’attaquer sur la rive gauche, tandis que Soult la presserait par la rive droite. Il était convaincu que les Autrichiens s’étaient détachés du fleuve, qu’il n’avait qu’à faire marcher pour circonscrire leur champ d’opérations ; le maréchal était loin d’adopter ses vues à cet égard. Les Autrichiens venaient de quitter la rive gauche du Lech et s’avançaient dans une sorte de confusion sur Ulm. Le pont de Guntzbourg était détruit, leurs flancs étaient assurés, leurs derrières hors d’atteinte ; il ne doutait pas qu’ils ne cherchassent à déboucher sur la rive gauche, et ne dissimulait pas les dangers que couraient les dragons établis à Heydenheim, si on ne se hâtait de les faire serrer sur lui.

« L’irruption, du reste, n’était pas imminente. Ney avait atteint les hauteurs de Burgberg le 8 ; le 9, il avait continué son mouvement. Loison avait enlevé Elchingen, Dupont s’était établi à Albeck, Malher avait fait halte à Riedhausen. Il menaçait à la fois Guntzbourg et Ulm, il était en mesure de battre, de contenir l’armée autrichienne quelque part qu’elle se présentât : mais la fortune semblait l’avoir mise hors d’état de rien entreprendre. Davoût atteignait Aicha ; Bernadotte entrait à Munich ; Soult, Marmont, poussant sur Landsberg, achevaient l’investissement des colonnes ennemies, et leur laissaient pour tout champ d’excursion l’étroit espace qui s’étend du haut Lech au Danube.

« Ainsi circonscrites, enveloppées, elles n’avaient d’autre alternative que de se jeter dans le Tyrol ou d’en venir aux mains ; car, de s’aventurer sur la rive gauche, le major général vit qu’il y avait de la folie à l’entreprendre, et plus encore à le supposer. Une bataille était donc imminente, et Napoléon désirait que le maréchal s’y trouvât. « Ne perdez pas de vue, écrivait à Ney le ministre de la guerre, que par ses projets, qui sont de cerner l’ennemi, l’Empereur se trouve obligé de disséminer un peu ses forces, et qu’il a besoin de toute la confiance qu’il a dans ses généraux et de toute leur activité pour ne pas rester oisif quand il faut agir. » Les troupes succombaient à la fatigue : depuis trois jours elles n’avaient ni subsistances ni repos. La pluie était battante, le sol détrempé ; tout ce qu’il y a de pénible dans la vie se réunissait sur elles. Mais la dépêche était pressante. Le général Malher eut ordre de faire ses dispositions. Arrivé le 10, à trois heures du matin, à Riedhausen, il se remit en marche dès que le jour parut, et s’avança sur Guntzbourg. La route était défoncée, le pays couvert de marécages. Il ne fit son mouvement qu’avec