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crédit, ni dans l’armée, ni dans la nation ; sa conduite, en fructidor 1797. l’avait discrédité dans tous les partis. Il avait gardé pour lui les papiers trouvés dans le fourgon de Klinglin, qui prouvaient les correspondances de Pichegru avec le duc d’Enghien et les Autrichiens, ainsi que les trames des factions de l’intérieur, pendant que Pichegru, masqué par la réputation qu’il avait acquise en Hollande, exerçait une grande influence sur la législature. Moreau trahit son serment, et viola son devoir envers son gouvernement, en lui dérobant la connaissance de papiers d’une si haute importance, et auxquels pouvait être attaché le salut de la République ; si c’était son amitié pour Pichegru qui le portait à ce coupable ménagement, il fallait alors ne pas communiquer ces papiers au moment où leur connaissance n’était plus utile à l’État, puisqu’après la journée du 18 fructidor le parti était abattu et Pichegru dans les fers. La proclamation de Moreau à l’armée et sa lettre à Barthélémy furent un coup mortel qui priva Pichegru et ses malheureux compagnons de la seule consolation qui reste aux malheureux, l’intérêt public.

« Moreau n’avait aucun système, ni sur la politique, ni sur l’art militaire ; il était excellent soldat, brave de sa personne, capable de bien remuer sur un champ de bataille une petite armée, mais absolument étranger aux connaissances de la grande tactique. S’il se fût mêlé dans quelques intrigues pour faire un 18 brumaire, il eût échoué, il se serait perdu, ainsi que le parti qui se serait attaché à lui. Lorsqu’au mois de novembre 1799, le corps législatif donna un dîner à Napoléon, un grand nombre de députés ne voulurent point y assister, parce que Moreau devait y occuper un rang distingué, et qu’ils ne voulaient rendre aucun témoignage de considération au général qui avait trahi la République en Fructidor. Ce fut dans cette circonstance que ces deux généraux se virent pour la première fois. Quelques jours avant le 18 brumaire, pressentant qu’il se.tramait quelques changements, Moreau se mit à la disposition de Napoléon, et lui dit qu’il suffisait de le prévenir une> heure d’avarice, qu’il viendrait à cheval près de lui, avec ses officiers et ses pistolets, sans autre condition. Il ne fut pas dans le secret du 18 Brumaire. Il se rendit le 18, à la pointe du jour, chez Napoléon, comme un grand nombre d’autres généraux et officiers qu’on avait prévenus dans la nuit et sur l’attachement desquels on croyait pouvoir compter.

« Le 18 brumaire à midi, après que Napoléon eut pris le commandement de la 17e division militaire et des troupes qui étaient à Paris, il donna celui des Tuileries à Lannes, celui de Saint-Cloud à Murât, celui de la chaussée de Paris et Saint-Cloud à Serrurier, celui de Versailles à Macdonald et celui du Luxembourg à Moreau. 400 hommes de la 96e furent destinés à marcher sous ses ordres pour garder ce palais ; ils s’y refusèrent ; disant qu’ils ne voulaient pas marcher sous les ordres d’un général qui n’était pas patribte. Napoléon dut s’y rendre lui-même et les haranguer pour lever ces difficultés.

« Après Brumaire, les Jacobins continuèrent à ramener et à chercher des appuis dans les armées de Hollande. Mas-séna était plus propre que personne pour commander dans la rivière de Gênes, où il n’y avait pas un sentier qu’il ne connût. Brune, qui commandait enHollande, fut envoyé dans la Vendée ; on rompit ainsi toutes les trames qui pouvaient exister dans ces armées. D’ailleurs le premier Consul n’eut jamais qu’à se louer de Moreau jusqu’au moment de son mariage