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douane que lui-même avait établie sur la frontière de France, et une contribution mensuelle de cent onces, que la douane d’Irun avait consenti à luipayer, afin qu’il n’entravât pas ses opérations. Il joignait à ces revenus les prises faites sur l’ennemi, les amendes dont il frappait des Espagnols suspects et quelques dons volontaires.

Dans le but de conserver, dans cette grande tourmente, les institutions civiles, il forma un tribunal de justice qui siégeait dans son camp, et auquel les peuples d’Alava et Guipuscoa, et même ceux du haut Aragon, venaient soumettre leurs différends. Il y joignit même le tribunal ecclésiastique de Pampelune, alors occupé par les Français. Nommé chef politique de la Navarre en 18i3, il profita de sa double autorité civile et militaire pour favoriser tout ce qui pouvait consolider les libertés publiques.

Ainsi, armé en même temps de l’épée du soldat et du glaive du magistrat, il réunit longtemps dans sa personne toute la force de l’État, et on lui rendit cette justice, qu’il n’avait abusé d’aucune de ces deux dictatures.

En 1814, Mina ayant passé la frontière, était occupé à bloquer Saint-Jean-Pied-de-Port ; lorsque la paix termina la campagne d’invasion, le partisan victorieux pouvait alors aspirer à tout, Ferdinand, rétabli sur son trône, désira le connaître ; mais pendant le mois que Mina passa à Madrid, il put se convaincre qu’il y a deux fortunes : celle des combats et celle des cours. Il était trop franc et trop simple pour obtenir jamais lesfaveurs de la dernière. Il parla à Ferdinand d’institutions et de libertés publiques, les courtisans s’alarmèrent de ce langage, et pour l’éloigner de la capitale, ils firent courir le bruit en Navarre que sa division allait cesser d’être considérée comme troupe’de ligne, mais qu’elle serait traitée comme corps franc ; de là, force désertions : Mina fut renvoyé dans sa province pour sévir contre les transfuges. Sa présence suffit pour calmer les esprits ; une simple proclamation ramena sous les drapeaux 2,500 déserteurs. Sûr de l’attachement de ses compagnons d’armes et indigné du joug que le parjure Ferdinand faisait peser surl’Espagne, Mina conçut le hardi projet de s’emparer de Pampelune, afin d’y ré tablir la constitution des Cortès. La tentative eut lieu dans la nuit du 25 au 26 septembre ; elle échoua, et le 4 octobre, Mina réduit au rôle de fugitif et de proscrit, se réfugia en France, où il fut reçu avec une distinction marquée par tous les officiers qui l’avaient combattu. Il était à peine arrivé à Paris qu’il fut arrêté sur la demande du comte de Casa Florès, ambassadeur d’Espagne ; mais il fut élargi presque aussitôt, et cinq jours plus tard, il eut la satisfaction de voir renvoyer par Louis XVIII l’ambassadeur qui l’avait dénoncé. Le noble exilé vécut à Bar-sur-Aube d’une modique pension que lui faisait le gouvernement français. Pendant les Cent-Jours, Napoléon voulut l’attacher à son service, et lui refusa le passeport qu’il avait demandé pour quitter la France ; mais inflexible dans son inimitié, Mina s’échappa clandestinement de Bar-sur-Aube, et quoique serré de près par les gendarmes, il réussit à gagner la frontière et se retira àBâle. Il passa delà àGand, et sans avoir toutefois combattu à Waterloo, il revint à Paris avec l’émigration de la seconde Restauration. Arrêté en 1816 par M. de Cazes avec le comte de Toreno et quelques autres proscrits espagnols qu’on accusait de conspiration contre les Bourbons, il ne fut relâché qu’après deux longs mois de captivité ; mais depuis cette épreuve, il vécut paisiblement à Paris jusqu’en 1820. La pierre de la constitution ayant été