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l’ennemi. Je recommande à la Chambre de renforcer promptement les armées ; qui veut la paix doit se préparer à la guerre. Ne mettez pas cette grande nation à la merci des étrangers ; craignez d’être déçus dans vos espérances. C’est là qu’est le danger. Dans quelque position que je me trouve, je serai toujours bien si la France est heureuse. »

« La Chambre des pairs s’empressa de suivre l’exemple des députés.

« L’abdication de Napoléon laissa le champ libre à l’ambition des factieux. Partagés d’opinions sur le chef qu’ils se choisiraient, un petit nombre seulement gardaient la neutralité, quoique tous regardassent le trône comme vacant. Après bien des discussions, il fut arrêté qu’on nommerait une commission exécutive de gouvernement, dont les membres furent pris dans le sein des deux Chambres. Cette violation de l’acte d’abdication le rendait nul, puisqu’on ne proclamait pas Napoléon II, en faveur de qui cette abdication avait été donnée. L’Empereur aurait dû alors se remettre à la tête de sa brave armée, combattre les ennemis qui s’avançaient sur Paris, qu’ils savaient plein d’agitation, et dont ils prétendaient tirer un parti avantageux ; mais, loyal dans toutes ses actions, l’Empereur partit pour Rochefort, d’où il pensait s’embarquer pour les États-Unis d’Amérique.

« L’ignominie de la faction, c’est que, tenant tous les fils de la trame ourdie pour enlacer ce prince, elle les tendait au moment de son départ, afin de le livrer à ses plus cruels ennemis ; heureusement qu’il échappa encore une fois à la trahison. Ne voulant point cependant s’éloigner de l’armée sans lui faire ses adieux, il lui adressa cette proclamation, dans laquelle il se montre toujours grand, toujours généreux, et toujours Français.

« Soldats !

« Quand je cède à la nécessité qui me force de m’éloigner de la brave armée française, j’emporte avec moi l’heureuse certitude qu’elle justifiera, par les services éminents que la patrie attend d’elle, les éloges que nos ennemis eux-mêmes ne peuvent lui refuser.

« Soldats ! je suivrai vos pas, quoique absent. Je connais tous les corps, et aucun d’eux ne remportera un avantage signalé sur l’ennemi, que je ne rende justice au courage qu’il aura déployé. Vous et moi nous avons été calomniés. Des hommes indignes d’apprécier vos travaux ont vu, dans les marques d’attachement que vous m’avez données, un zèle dont j’étais seul l’objet ; que vos succès futurs leur apprennent que c’était la patrie, par-dessus tout, que vous serviez en m’obéissant ; et que si j’ai quelque part à votre affection, je le dois à mon ardent amour pour la France, notre mère commune.

« Soldats ! encore quelques efforts, et la coalition est dissoute. Napoléon vous reconnaîtra aux coups que vous allez porter.

« Sauvez l’honneur, l’indépendance des Français ; soyez jusqu’à la fin tels que je vous ai connus depuis vingt ans, et vous serez invincibles15. »

« L’armée, dont une partie des généraux avait abandonné les rangs ou s’était vendue à prix d’argent, consternée d’avoir perdu sans retour son illustre chef, se retira sur les rives de la Loire, où elle fut sacrifiée et dispersée par ceux qu’elle avait sortis de la poussière. »

Napoléon partit pour la Malmaison, le 25, où il fut reçu par la princesse Hortense. Les souvenirs que lui rappela cette résidence lui causèrent une violente