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huit armées s’étaient formées, sous les noms d’armées du Nord, de la Moselle, du Rhin, du Jura, des Alpes, des Pyrénées, de Paris, de Laon ; 150 batteries étaient disponibles ; on organisait des corps francs et des partisans. La levée en masse des sept départements frontières du Nord et de l’Est était résolue et prête ; les places fortes étaient bien approvisionnées, les défilés étaient gardés, la France enfin pouvait se croire capable de défier, de soutenir et même de repousser les efforts de l’Europe coalisée. Napoléon avait restitué aux régiments ces beaux surnoms d’Invincible, de Terrible, d’Incomparable, qu’ils brûlaient de mériter toujours. L’armée comptait 200.000 hommes. La garde nationale, composée de 3.130 bataillons, dont 1.500 compagnies de chasseurs et de grenadiers, formant 180.000 hommes, fut mise à la disposition du ministre de la guerre.

Cependant, le 12 mai, un rapport est publié à Vienne, par ordre du Congrès, dans lequel il est dit que les puissances ne se croient pas autorisées à imposer un gouvernement à la France ; et elles ne cessent d’armer en faveur des Bourbons.

Le 27 mai, les souverains d’Autriche, de Prusse et de Russie, quittent Vienne pour aller se mettre à la tête de leurs armées, qui sont en pleine marche sur la France.

Le 1er juin eut lieu la réunion dite du Champ-de-Mai ; le service divin fut célébré sur un autel immense, élevé au milieu du Champ-de-Mars. On remarqua l’attitude de Napoléon pendant la cérémonie, elle avait toutes les marques dé la grandeur et du triomphe. Après avoir répondu au discours de l’orateur de la députation des électeurs des départements, Napoléon prêta serment sur l’Évangile aux constitutions de l’Empire et à leur observation ; il reçut le serment de fidélité du peuple par les électeurs.

Le 7 juin, Napoléon fait l’ouverture des Chambres ; à cette occasion, il prononça un discours, dont voici quelques passages :

« Aujourd’hui s’accomplit le désir le plus pressant de mon cœur : je viens commencer la monarchie constitutionnelle. La monarchie est nécessaire en France pour garantir la liberté, l’indépendance et les droits du peuple. J’ambitionne de voir la France jouir de toutes les libertés possibles ; je dis possibles, parce que l’anarchie ramène toujours un gouvernement absolu. L’armée et moi, nous ferons notre devoir. Vous, Pairs et Représentants, donnez à la nation l’exemple de la confiance ; de l’énergie et du patriotisme ; et comme le Sénat du grand peuple de l’antiquité, soyez décidés à mourir plutôt que de survivre au déshonneur et à la dégradation de la France. La cause sainte de la patrie triomphera. »

Deux jours après, dans ses réponses. aux adresses des deux Chambres, il disait aux Pairs :

« La lutte dans laquelle nous sommes engagés est sérieuse ; l’entraînement de la postérité n’est pas le danger qui nous menace aujourd’hui. C’est sous les fourches Caudines que les étrangers veulent nous faire passer. C’est dans les temps difficiles que les grandes nations, comme les grands hommes, déploient toute l’énergie de leur caractère, et deviennent un objet d’admiration pour la postérité. »

Il dit aux Représentants :

« La constitution est notre point de ralliement ; elle doit être notre étoile polaire dans ces moments d’orage. Toute discussion publique qui tendrait directement ou indirectement à diminuer la confiance qu’on doit avoir dans ses dispositions, serait un malheur pour l’État. N’imitons pas l’exemple du Bas-Empire, qui, pressé de tous côtés par les Barbares,