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était fait pour toujours de la fortune de Napoléon. Enfin, le 12 avril, Monsieur, comte d’Artois, frère du roi, faisait son entrée solennelle dans Paris. Malgré ces divers événements, Napoléon s’obstinait à refuser son approbation au traité. Il passa la soirée du 12 avec le duc de Vicence et se retira à onze heures.

Ce fut pendant la nuit du 12 au 13 que, suivant quelques relations, ce prince aurait essayé de terminer ses jours par le poison. Voici le récit de M. de Norvins :

« Ayant fait appeler le duc de Vicence à une heure du matin, Napoléon lui dit de prendre dans son cabinet le portefeuille qui contenait le portrait et les lettres de l’Impératrice : « Gardez-les, lui dit-il ; vous les remettrez un jour à mon fils. Ne le quittez pas ; soyez-lui fidèle comme à moi. Remettez à l’impératrice la lettre que voici ; dites-lui que je ne déplore mes malheurs qu’à cause d’elle et du roi de Rome. N’ayant pu faire triompher la France de ses ennemis, je ne regrette point la vie. » L’Empereur lui dicta ses autres volontés et lui fit présent de son portrait sur un camée. Napoléon lui parlait encore quand il fut interrompu par une crise subite qui effraya le duc de Vicence : ses yeux se voilèrent, parfois il paraissait s’assoupir pour ne plus se réveiller, quand une sueur de glace le couvrit, et soudain une sueur violente, qui raidit ses membres, amena des vomissements. Napoléon tenait fortement le duc de Vicence afin qu’il ne lui échappât point, lui répétant que s’il était son ami, il ne devait pas s’opposer à ce qu’il terminât son existence.

Ce combat de la vie contre la mort dura près de trois quarts d’heure.

Enfin, les vomissements ayant débarrassé l’Empereur : « C’en est fait, dit-il, la mort ne veut pas de moi. » Et tout de suite il fit appeler son chirurgien Yvan et lui demanda une potion. Celui-ci, atterré par cette demande, prit la fuite et quitta Fontainebleau. La crise avait été si violente que le 13 l’Empereur ne put se lever avant onze heures. »

Napoléon avait déjà voulu, a-t-on dit, s’asphyxier dans son cabinet de bain par le charbon ; mais ses gens, soupçonnant l’usage qu’il se proposait d’en faire, avaient refusé de lui en donner. Alors, il eut recours à ses pistolets, qu’il chargea ; mais son mameluck et ses valets de chambre s’en étant aperçus, en ôtèrent l’amorce et la poudre en son absence.

On prétend que le poison par lequel Napoléon aurait voulu se détruire avait été inventé par Cabanis, à l’époque de la terreur, pour son usage et celui de ses amis. C’est de ce poison que Condorcet prit et dont il mourut en prison. Napoléon en portait constamment sur lui depuis le désastre de Moscou.

Nous repoussons, nous, ces différents projets de suicide comme n’ayant pu exister, parce que la vie tout entière de l’Empereur ne semble pas permettre d’y croire : constamment résigné devant l’impossibilité d’événements meilleurs, on l’a toujours vu déterminé, ferme, grand, plein de courage ; et puis il avait dans le cœur cette foi religieuse qui soumet l’homme aux volontés de Dieu.

Quoi qu’il en soit, le 13, Napoléon signe à Fontainebleau le traité conclu le 11, à Paris, entre les maréchaux Ney, Macdonald, le général Caulincourt, ses plénipotentiaires, et les ministres d’Autriche, de Russie et de Prusse. En voici un extrait :

Art. 1er. Sa Majesté l’empereur Napoléon renonce, pour lui et les siens, à tout droit de souveraineté et de domination tant sur l’Empire français et sur le royaume d’Italie que sur tout autre pays.

2. Leurs Majestés l’empereur Napoléon et Marie-Louise conserveront leurs titres et rang pour en jouir pendant leur