France avec la Savoie, Nice et l’île d’Elbe, et à condition que la couronne du royaume d’Italie, dont l’Adige formera la frontière du côté de l’Autriche, sera donnée au prince Eugène, et aussi avec la réserve que les principautés de Lucques, de Neufchâtel, le grand duché de Berg retourneront aux titulaires qui en étaient précédemment investis.
Ce contre-projet est rejeté, par la raison que la France possédant une force territoriale infiniment plus grande que ne le comporte l’équilibre de l’Europe, les cessions qu’elle ferait ne seraient qu’apparentes. « L’expérience a démontré que les États intermédiaires, sous la domination de la famille régnante actuellement en France, ne sont indépendants que de nom. L’Europe ne ferait pas la paix, mais elle désarmerait. Les cours alliées, considérant que le contre-projet proposé est essentiellement opposé aux bases de paix proposées par elles, ne peuvent reconnaître dans la marche suivie par le gouvernement français que le désir de traîner en longueur des négociations aussi inutiles que, compromettantes. Elles déclarent qu’elles ne font point la guerre à la France, dont les justes dimensions sont une des premières conditions d’un état d’équilibre politique ; mais qu’elles ne poseront les armes qu’autant que leurs principes seront reconnus et admis par le gouvernement français. » Là finit le congrès de Châtillon, dont les fluctuations eurent constamment pour cause les succès ou les revers des armées belligérantes des deux partis.
Le 20, Napoléon est à Arcis, qu’il veut traverser pour se diriger sur Bar-sur-Aube ; mais il apprend que l’ennemi est sur la route de Troyes, il s’y porte avec 30.000 hommes ; l’affaire s’engage avec toute l’armée de Schwartzenberg, forte de 100.000 combattants. Dans cette journée et celle qui suivit, l’Empereur se comporta comme le premier soldat de la France ; souvent il est obligé de se servir de son épée pour se dégager des masses qui l’entourent. L’ennemi fait le feu d’artillerie le plus vif, un obus vient en roulant s’arrêter à côté d’un des carrés de la garde, dans lequel il occasionne un mouvement. L’Empereur qui s’en aperçoit pousse son cheval vers le projectile, et paraît s’étonner que des soldats tant de fois éprouvés fassent attention à pareille chose. L’obus éclate, un nuage de fumée le dérobe à ses troupes ; mais ni lui, ni son cheval, ni personne n’est atteint. Ce trait hardi de courage et de sang-froid rappelle Charles XII. Quelle supériorité de caractère, quelle présence d’esprit ! Le combat continue toute la nuit, un seul pont reste à Napoléon pour échapper, lui et son armée, à la supériorité numériquement prépondérante de l’ennemi, il ordonne d’en jeter un second. Le 21, au matin ; Arcis est évacué, et la retraite s’opère avec le plus grand ordre sur Vitry-le-François. Le 23, le quartier général de l’Empereur est à Saint-Dizier ; le même jour s’opère dans les plaines de Châlons la réunion des armées de Blücher et de Schwartzenberg.
Le 25, les maréchaux Mortier et Marmont, dans la croyance naturelle que Napoléon se replierait sur eux devant Schwartzenberg, étaient accourus au-devant de lui, sur la route de Fère-Champenoise. Attaqués séparément par des masses énormes de cavalerie, ils sont rejetés sur la route de Paris par Sézanne et Coulommiers. Après avoir essuyé une perte de 9.000 hommes, dont 5.000 tués ou blessés, et de soixante bouches à feu, dans cette malheureuse affaire que les étrangers appellent la victoire champenoise, nos soldats eurent à combattre, outre une immense cavalerie, un ouragan qui le frappait de front, et une pluie