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veux longs noués en torchon au sommet de la tête. Leur langue est la même quant au fond, et ne diffère guère du siamois et du laotien oriental que par la prononciation et l’acception de certaines expressions qui ne sont plus en usage chez le premier de ces peuples.

Je ne tardai pas à être convaincu que, sans la chaude lettre du gouverneur de Kôrat, j’aurais eu partout des chefs le même accueil qu’à Tchaïapoune ; mais celle-ci est très-explicite : n’importe où je passerais on devait me fournir des éléphants et m’apporter toutes les provisions nécessaires comme si j’étais un envoyé du roi. Aussi je me réjouissais grandement de voir ces petits chefs de provinces marchant aux ordres de mes domestiques et craignant à chaque instant que, suivant l’usage siamois, je n’usasse du rotin. Un de mes hommes, pour se donner un certain relief de dignité et de pouvoir, avait attaché un de ces épouvantails aux armes dont il était porteur, et cette vue seule suffisait, avec le son du tam-tam, pour inspirer la crainte, tandis que de petits présents distribués à propos et de bons pourboires aux cornacs m’attiraient la sympathie du peuple.

La plupart des villages se trouvent situés à une journée de distance les uns des autres ; cependant il faut quelquefois marcher trois ou quatre journées avant de rencontrer une seule habitation ; on est alors forcé de coucher dans le jungle. Dans la bonne saison, je le trouverais peut-être agréable ; mais dans celle des pluies, rien ne peut donner une idée des souffrances que les voyageurs éprouvent la nuit sous un mauvais abri de feuilles élevé à la hâte au-dessus