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la plus commerçante du Mênam ; il était à peu près nuit, et le silence ne tarda pas à régner autour de nous ; mais, levé avec le jour, dès que j’aperçus ces beaux navires dormant sur leurs ancres au milieu du fleuve, les toits des palais et des pagodes réfléchissant les premiers rayons du soleil qui réveillaient la vie et le mouvement sur le fleuve, il me sembla que jamais Bangkok ne m’avait paru aussi beau.

Ce fleuve est sillonné presque constamment par des milliers de bateaux de différentes grandeurs et de différentes formes. Le port de Bangkok est certainement un des plus beaux et des plus grands du monde, sans en excepter celui de New-York si justement renommé : il peut contenir des milliers de navires en toute sûreté.

La ville de Bangkok s’accroît en population et en étendue chaque jour, et il n’est pas douteux qu’elle deviendra une capitale très-importante, si la France réussit à s’emparer de l’Annam, car alors le commerce deviendra plus considérable entre ces deux pays. Cette ville, qui compte à peine un siècle d’existence, contient à peu près un demi-million d’habitants, et parmi eux beaucoup de chrétiens : le drapeau de la France, flottant dans la basse Cochinchine, favorisera encore les établissements religieux de tous les pays environnants, et nous avons lieu d’espérer que le nombre de chrétiens s’augmentera dans une proportion plus forte que par le passé.

Cependant la vie ici ne pourrait jamais me plaire ; je ne puis rester condamné à un mode de locomotion pénible pour moi. La vie active, les chasses, les bois, voilà mes éléments.