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reusement, un lépreux, et c’est pour obtenir des dieux la santé qu’il fit bâtir ce temple. Cette œuvre achevée, le roi n’étant pas guéri, perdit confiance dans ses divinités et recourut aux soins des simples mortels. Il fit donc une proclamation et offrit une grande récompense à celui qui pourrait le guérir. Ce qui eut lieu à cette époque est laissé aux conjectures de chacun ; mais s’il ne s’est pas alors trouvé plus qu’aujourd’hui au Cambodge et à Siam d’hommes capables de guérir cette maladie, nous ne nous en étonnerons pas. Seul, un brahmane illustre, djogui ou fakir, osa entreprendre cette cure. Il croyait fermement aux effets de l’hydropathie ; mais il préférait que le liquide fût en état d’ébullition et proposa à son client royal de le tremper dans un bain d’eau-forte, liquide assez corrosif. Le roi hésitant naturellement devant un pareil procédé, exprima le désir de voir d’abord faire l’expérience sur un tiers ; mais personne ne se présenta pour la subir, et le fakir proposa de la tenter sur un criminel. Le roi qui au fond était jaloux du pouvoir surnaturel du brahmane, lui demanda s’il voulait essayer sur lui-même. « Je le veux bien, répliqua le fakir, si Votre Majesté veut me promettra solennellement de jeter sur moi une certaine poudre que je vais vous laisser. » Le roi promit, et le malheureux médecin, trop crédule, entra dans la chaudière bouillante. Le roi lépreux la fit enlever et jeter avec celui qu’elle contenait dans le fleuve.

C’est, dit-on, cette trahison qui a amené sur cette ville la décadence et la ruine.

D’après une autre légende d’égale valeur, sur