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Enfin nous apercevons devant nous une bourgade dominée par les murailles en terre de ce qu’on appelle ici pompeusement une citadelle ; nous sommes à Battambâng, et, comme partout, c’est un prêtre français qui vient nous offrir l’hospitalité. Que M. Sylvestre reçoive ici l’expression de ma gratitude pour son bienveillant accueil et pour l’aide qu’il a prêtée à mes recherches de naturaliste et d’archéologue.

Il y a près d’un siècle que la province de Battambâng est soumise au Siam ; depuis ce temps, plusieurs fois elle a cherché à se soulever et même à se donner aux Annamites qui s’étaient emparés, il y a une vingtaine d’années, de tout le Cambodge ; mais ceux-ci furent repoussés par les Siamois jusqu’au-delà de Penôm-Penh. Depuis ce temps, le Cambodge n’a pas éprouvé d’autre attaque des Cochinchinois ; mais il est resté tributaire de Siam.

Sans la guerre que depuis deux ans la France fait à l’empire d’Annam, il est probable qu’aujourd’hui la dernière heure aurait sonné pour le petit royaume de Cambodge, dont la destinée peu douteuse est de s’éteindre et d’être assimilé aux peuples voisins. Toutes les habitations construites sur les bords de cette petite rivière sont entourées de belles plantations de bananiers et perdues au milieu de leur feuillage rubanné et de la verdure intense de superbes manguiers.

La majorité de la population de Battambâng est cambodgienne ; les cultivateurs ont leurs rizières derrière leurs demeures ; et, quoique soumis à l’étranger depuis près d’un siècle, ils ont conservé