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Ils laissent la plus grande liberté à leurs esclaves, et ils n’infligent jamais de peine corporelle à un homme : pour vol, on condamne le fripon à tuer un porc ou un bœuf et à une ou plusieurs jarres de vin ; tout le village prend part au festin, et lorsque l’individu ne se soumet pas à cette condamnation, sa dette augmente promptement, et il ne tarde pas à en être pour quinze ou vingt buffles ; alors il est vendu comme esclave.

Les Stiêngs n’ont ni prêtres ni temples ; cependant ils reconnaissent l’existence d’un être suprême auquel ils rapportent tout bien et tout mal ; ils l’appellent Brâ et l’invoquent dans toutes les circonstances. Les mariages se font par-devant les chefs de la tribu et sont toujours accompagnés de réjouissances.

Les funérailles se font solennement, tout le village y assiste ; les proches parents du défunt seuls restent quelquefois à la maison ; tous les assistants, tristes ou non, poussent des cris lamentables. On inhume les morts près de leurs demeures, on recouvre la tombe d’un petit toit de feuilles, puis on y dépose des calebasses pleines d’eau, des flèches, quelquefois de petits arcs, et tous les jours un des membres de la famille y sème quelques grains de riz, afin que le défunt puisse se nourrir et continuer à vivre comme jadis. Sous ce rapport, ils ont les mêmes habitudes que les Chinois. Avant chaque repas, ils ont soin de répandre à terre un peu de riz pour alimenter l’âme de leurs ancêtres ; dans les sentiers fréquentés autrefois par eux, dans leurs champs, ils font les mêmes petits sacrifices. Au bout d’un long bambou