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source, qui se trouvait là, sur le bord d’un sentier.

Puis les garçons et la vieille se couchèrent dans leurs caisses de bois. On entendit bientôt dans la cabane assombrie s’élever le bruit de leur respiration.

Toujours songeur, comme si on avait remué en lui trop de choses, le vieux resta près de la porte, fumant sa pipe.

Les taches d’or mouvantes, qui tout à l’heure criblaient le feuillage dans la direction du couchant, s’étaient éteintes. Au milieu de ce silence, l’âme de la forêt semblait se révéler confusément et monter vers le ciel avec les souffles du soir, qui roulaient sur les feuillages. La clameur des crapauds se levait des mares lointaines. À peine de temps à autre entendait-on un bruit : un pivert attardé, qui frappait de son bec les troncs vermoulus, pour y chercher des insectes ; un geai qui regagnait son nid en jacassant, et qui secouait le silence du battement lourd de ses ailes.

Marthe maigrissait à vue d’œil.

De plus fortes se seraient raidies, auraient voulu oublier, auraient tenté l’impossible. À quoi bon ? Elle sentait d’avance que tout effort était vain. Tranquille et résignée, elle ne savait que souffrir silencieusement. Pas un seul moment, l’idée ne lui vint de recourir à la coquetterie, aux manèges des femmes délaissées, qui par un dédain habilement affecté, savent faire naître la jalousie et provoquer des regains d’amour. Elle se terrait dans son coin, comme une bête blessée qui se