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le choix entre la turpitude et la solitude. On a pu dire autrefois : « Quiconque s’élève s’isole », et c’est une parole déjà désolante ; mais la honteuse évidence contemporaine est qu’il suffit, pour être isolé, de ne pas descendre !

Rien, dans ces prémisses, n’exclue les ressources de l’observation, soit psychologique de Stendhal, soit physiologique de M. Zola, soit psychologique et physiologique tout ensemble et, si l’on veut, moderniste de M. de Goncourt. Je cite à dessein ces trois noms qui appellent inégalement et foncièrement l’estime : ne personnifient-ils pas ce qu’il y a de plus spécial dans la littérature de ce temps ? Mais des yeux bien ouverts n’hésiteront pas longtemps, je pense, à distinguer, d’une part, ce qui dans les œuvres de ces trois Maîtres ment glorieusement à l’idéal public — (cet idéal qui triomphe, « raffiné », dans les livres de MM. Daudet et Loti, « vulgaire », dans ceux de M. Ohnet) — et ce qui, d’autre part, y avoue une insuffisance de répondre à toutes les hautaines exigences de cette heure. Heure solennelle ! Je le répète : la fin du monde ou le commencement d’un monde ? Ces préoccupations peuvent n’être point universelles : il suffit pour être significatives qu’elles soient celles des meilleurs et des plus sincères. Il est constant qu’une fièvre les prend de rendre de leur Humanité un grand témoignage et que l’Art leur apparaît comme un moyen vénérable, et qu’il ne