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naturelles, Lamennais versa dans l’hérésie. Depuis lui, quiconque s’illustra dans l’Église fut suspect. — Peut-être la religion chrétienne est-elle enterrée dansla Somme de Saint-Thomas. » — Voilà ce qu’on est tenté de répondre. Il se peut que cette réponse soit erronnée. Je l’ai déjà dit, il se peut qu’avant longtemps nous admirions la résurrection de la grande Endormie dont le sommeil semble le sommeil de la mort. Nous croirons alors et avec quelle enthousiaste joie nous crierons hosannah ! Mais, pour l’heure, notre sincérité même — il fallait que cela fût dit — nous éloigne d’un Credo qui n’est plus, pensons-nous, que son propre simulacre et nous croyons suivre son originelle impulsion en le dépassant. Habitués à voir luire la Beauté sur toute Religion actuellement vraie, à voir dans la Beauté la gardienne et le signe de la Vérité, nous demandons à la Beauté seule — puisque les Religions l’ont exilée d’elles — quelle Vérité elle doit éclairer. Poètes et penseurs, nous écoutons les vents de mystère qui sourdent du fond des phénomènes et nous allons à la lumière, à la vie, fût-ce au fond des ténèbres historiques, si elles recèlent plus de vie et de lumière que ce présent crépuscule qui semble mener la danse des morts.

Nous cherchons la Vérité dans les lois harmonieuses de la Beauté, déduisant de celle-ci toute métaphysique — car l’harmonie des nuances et des sons symbolise l’harmonie des âmes et des mondes