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où l’auteur oublie la terminologie des laboratoires, mais on n’en regrette que davantage tous ces inutiles frais d’érudition. — La vie des personnage est incomplète : ce sont des sensitifs qui n’auraient point de cerveau, et l’écrivain, trop uniquement savant, semble expérimenter sur des » sujets » fabriqués selon les plus récentes recettes de la science. — Enfin, dans des compositions lourdes, longues, sans concentration, quel excès de sombres histoires et de rencontres funestes ! Quelle noire prédilection, et combien violemment contentée, pour le malheur ! — Ces réserves faites, J.-H. Rosny est un puissant évocateur. Ses abus-mêmes de science sont le tort d’un grand mérite, d’un très intense sentiment, de l’une des principales directions de la pensée humaine, de la première des conditions fondamentales de l’art moderne : l’alliance du sens religieux et du sens scientifique. C’est pourquoi ce savant est mystique. Je crois que, n’était le socialisme, cette double impulsion — scientifique et mystique — conduirait ce poëte à dégager ses fictions de l’heure immédiate et vérifiable. On peut craindre que la presque constante préoccupation sociale le retienne dans une formule un peu surannée de roman. Toujours y sera-t-il d’une incontestable originalité ; dès aujourd’hui, c’est le plus suggestif analyste de l’influence des phénomènes naturels sur l’organisme humain.