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nous avons de l’insuffisance irrémédiable et parfaite des êtres à qui nous demandons le bonheur et de la sincérité pourtant invincible et non moins parfaite de notre insistance à le leur demander, — est le cri, lui-même conscient et se raillant, de cette maladie des modernes, la Conscience. Parfois, chez Laforgue, elle dépasse l’âme moderne et l’âme humaine, cette conscience toujours éveillée, elle devient la conscience immense et froide de la nature, l’universelle activité vitale qui se surveille accomplir son destin. C’est, dans les Moralités légendaires, ce chef-d’œuvre : Pan et la Syrinx. Mais bien entendu, ce n’est pas cette philosophie si simplement, — et la conscience aussi de la nature, symbolisant un cas très particulier d’âme en attente, se raillera d’être ce que cette âme pense de si philosophique :


L’Autre sexe ! l’Autre sexe !
Oh ! toute la petite Ève
Qui s’avance, ravie de son rôle,
Avec ses yeux illuminés
D’hyménée,
Et tous ses cheveux sur les épaules,
Dans le saint soleil qui se lève !…

Un corps, une âme
Amis d’enfance !
Toute ma femme
De naissance !…


— Ô Syrinx ! Voyez et comprenez la Terre et la merveille de cette matinée et la circulation de la vie.

Oh, vous là ! et moi, ici ! Oh, vous ! Oh, moi ! Tout est dans Tout !