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frances, à cette bataille définitive de l’Homme et de la Nature : « Ce n’est plus un duel courtois, c’est un combat sérieux qu’il doit soutenir contre l’Isis éternelle ; il ne veut plus seulement soulever ses voiles, il veut les déchirer, les anéantir à jamais et, privé de ses Dieux évanouis, posséder du moins l’immuable Nature, car il sent que ces Dieux renaîtront d’elle et de nouveau peupleront les solitudes du vaste azur et les jardins mystérieux où fleurissent les étoiles. » Voilà le Poëte dont on a dit et qui a laissé dire qu’il ne pense pas, — cela parce que, artiste parfait, il ne touche de ses vers sa pensée que par les sons et les couleurs du Symbole qui la concrète. Comme lui, laissons dire et, nous qui savons bien pourquoi, admirons et aimons.

Je crois que M. Catulle Mendès a les dons d’un très haut Poëte : s’il n’est que le plus inouï des artistes faut-il en accuser lui-même ou son temps ? On sait que, plus que d’un autre, le Parnasse est son œuvre, l’œuvre de son énergie, de son activité, aussi de son talent. Peut-être est-il resté trop fidèle à l’école qu’il avait si bien servie. Peut-être la nature même de son talent, si souple, si divers, ingénieux à saisir tous les procédés, ne lui permettait pas cette unité de vues où il faut se réduire pour l’unité de l’œuvre. C’est à coup sûr le plus intelligent des hommes, le plus compréhensif et le plus savant des artistes. Je ne crois pas qu’il