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VIII. — fidélité dans la persécution


L’enfance a des droits inaliénables auxquels correspondent autant de devoirs pour l’éducateur. Comme une impression reçue à l’école ne s’efface que difficilement, il est de la plus élémentaire prudence, pour ne pas dire honnêteté, de ne servir à l’intelligence de l’élève que ce qui ne blesse en aucune manière les droits de la vérité et ne peut faire l’objet d’aucun doute. Les sujets de controverse et les questions débattues pourront plus tard attirer l’attention de la jeunesse ; quand l’esprit est encore en tutelle, il est plus que convenable de respecter sa faiblesse et de ne lui présenter que ce qui est incontestable.

Aussi, n’est-ce pas sans quelque surprise que j’ai trouvé récemment le passage suivant qui a trait aux événements de 1869-70, dans un manuel anglais « autorisé pour les provinces de Manitoba, Ontario et Colombie Britannique » :

Le centre de la tempête était le parti des métis français mené par Louis Riel. Riel était le fils d’un blanc et d’une métisse, et avait été élevé à Montréal pour la prêtrise. Sa facilité d’élocution et le magnétisme de ses manières lui donnèrent vite un grand ascendant sur ses compatriotes ; une ambition sans frein et une vanité extraordinaire l’aveuglèrent au point qu’il ne put voir la folie de résister à l’autorité du Dominion. Il n’y avait personne dans la colonie pour le retenir dans sa folie rageuse (his madness). Sans le courage et le tact de Donald-A. Smith, l’agent du gouvernement fédéral, les affaires auraient pu prendre une pire tournure. L’archevêque Taché… ne revint qu’après que le délire de la rébellion se fut éteint dans le meurtre…

Il y avait toute probabilité que la difficulté allait s’arranger sans effusion de sang, quand un accès soudain de folie de la part de Riel se termina par une tragédie. Parmi les prisonniers que ce dernier avait jetés dans le fort Garry comme ennemis du « Gouvernement Provisoire » était un jeune immigrant de l’Ontario nommé Thomas Scott. Cet infortuné jeune homme fut choisi par Riel pour devenir l’instrument de son terrorisme sur ses contradicteurs. Passé en cour martiale et condamné pour cause de trahison, Scott fut conduit en dehors des murs du fort Garry et fusillé. La nouvelle de cet assassinat brutal souleva une tempête d’indignation dans l’est du Canada. Une force de sept cents soldats et volontaires fut choisie pour se rendre immédiatement sur la scène de la rébellion… À l’approche des troupes, toute ardeur militaire et ivresse du pouvoir s’éteignirent dans la poitrine de