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la qualité de Français ou de Canadien était encore le meilleur des passeports au travers des grandes prairies américaines. Ces pionniers leur inculquèrent des idées de paix et de concorde, qui étaient aussi nouvelles chez ces hordes barbares que nécessaires au salut des nouveaux venus et à la réussite de leurs affaires. Mais, au point de vue ethnologique, leur petit nombre et la faiblesse résultant de leur isolement ne leur permirent guère de laisser de traces durables de leur passage.



C’est pourtant à cette époque que nous devons rattacher le berceau du premier métis dans le Nord-Ouest canadien dont l’histoire ait enregistré le nom, François Beaulieu, le patriarche de la rivière au Sel. M. le juge L.- A Prud’homme, l’écrivain sans contredit le mieux renseigné sur l’histoire ancienne du pays, fixe à 1775 ou 1776 la date de la naissance de Beaulieu, et le fait que les missionnaires le croyaient centenaire, quand il mourut en novembre 1872, confirme l’opinion du savant magistrat.

D’un autre côté, du récit que le vieillard fit au P. Petitot de l’arrivée des blancs au Grand Lac des Ours en 1799, il appert qu’il n’était alors âgé que de « plus de 17 ans », ce qui voudrait dire, il me semble, moins de 18, à en juger par la manière de parler des Indiens dans la langue desquels Beaulieu s’exprimait[1]. Dans tous les cas, cette computation est basée sur le chiffre que Petitot donne comme représentant l’année de la construction du premier fort de traite sur les bords de cette mer intérieure. Il reproduit cette date dans son Exploration de la Région du Grand Lac des Ours[2], l’appuyant de la remarque que c’était dix ans après la découverte du Mackenzie, ce qui est plus conforme à la vérité historique que l’assertion du même ouvrage[3], à l’effet que la dite exploration n’eut lieu qu’en 1793.

Ce qui démontre péremptoirement l’erreur de cet auteur ou de son guide en histoire locale est le fait que, cette même année 1793, François Beaulieu accompagna sir Alexander Mackenzie dans son grand voyage à l’océan Pacifique. Il va sans dire qu’en entreprenant une exploration si périlleuse sous tous les rapports, Mac-

  1. Traditions indiennes du Canada Nord-Ouest, p. 330. Alençon, 1887
  2. P. 68. Paris, 1893.
  3. Ibid., p. 56.