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deux pièces de canon[1]. Le rendez-vous avait été fixé au 15 juin : mais le parti de l’est n’arriva que le 20, tandis que les Canadiens, métis et sauvages qui venaient d’opérer sur l’Assiniboine, firent leur apparition à quelque distance du fort Douglas, le soir du 10.



Pour s’assurer le concours des émissaires du fort William, les cavaliers de la Compagnie du Nord-Ouest, conduits par un métis influent du nom de Cuthbert Grant, avaient reçu ordre de passer à distance du fort Douglas, afin d’éviter d’attirer l’attention de ses gardiens. Mais des lacs et des marécages les empêchèrent de passer aussi loin qu’ils l’eussent voulu. En sorte que, vers cinq heures du soir, la sentinelle du fort signala la présence de la troupe qui paraissait se diriger vers les fermes des colons.

Le gouverneur, R. Semple, monta alors au corps de garde muni d’une longue-vue, à l’aide de laquelle il s’assura que les cavaliers étaient tous armés et semblaient animés d’intentions hostiles. En conséquence, il partit avec une vingtaine d’hommes armés, auxquels quelques autres s’adjoignirent en chemin, pour aller les ren­contrer dans la plaine.

Ils avaient peut-être fait un demi-mille quand ils furent accostés par des colons qui, alarmés du danger qui les menaçait, allaient chercher un refuge dans l’enceinte du fort. S’apercevant alors que l’ennemi était plus nombreux qu’il ne l’avait cru d’abord, le gouverneur envoya un nommé Bourke chercher une pièce de canon au poste et requérir les services d’autant d’hommes que Miles Macdonell pourrait lui en donner.

Après quelque temps d’attente, comme Bourke ne revenait point, Semple se dirigea avec sa suite vers la bande de métis qui, la figure horriblement peinte, et déguisés en guerriers sauvages, avaient déjà capturé trois fermiers.

Aussitôt que les gens du Nord-Ouest aperçurent les représentants de la compagnie anglaise, ils s’élancèrent à leur rencontre en disposant leurs rangs en forme de croissant, de manière à les prendre entre deux feux. Alors un Canadien nommé Boucher,

  1. Ces chiffres sont de l’abbé Dugas (L’Ouest canadien, p. 337). Il est vrai de dire que, dans un ouvrage précédent, Monseigneur Provencher, p. 36, le même auteur n’avait parlé que d’une soixantaine d’hommes armés, traînant avec eux un canon.