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petit au désir de marcher, de se mouvoir, son indifférence faisant place à une velléité d’apprendre, de dire, de s’informer.

La veille, le docteur avait passé toute une heure en sa compagnie, et ils avaient devisé ensemble, assis sur un banc du parc, le malade confessant au médecin jusqu’à ses plus secrètes faiblesses. C’étaient les bonnes heures pour le pauvre Fernand, celles où il lui était donné de rompre avec son seul ami le silence qu’il s’était imposé, et qui souvent lui était si pénible, qu’il en avait de longues et douloureuses angoisses.

Il répondait aux questions du médecin, lui détaillant par le menu les impressions de son mal ; puis, au premier prétexte, il oubliait le savant pour ne plus voir que l’ami. Il s’épanchait alors en longues plaintes. Ce n’était point la maladie, qui le tenait empoignée comme en une main de fer : elle était prête à lâcher pied, celle-là, vaincue par le régime salutaire des eaux vivifiantes. Ce qui l’empêchait de guérir, c’était cette plaie au cœur, à jamais ouverte, cet amour respectueux mais violent qu’il n’osait avouer. C’était la blessure qu’avait faite à sa pauvre âme la réponse de son tuteur à la lettre dans laquelle il lui avait tout raconté. C’était la terreur irréfléchie, inexprimable que lui inspirait la seule vue de M. Dubreuil, et la pitié de son regard quand il le saluait.

Quelle consolation avait-il, l’infortuné, à toutes ces douleurs ? Une seule, la bienveillante amitié de l’excellent médecin.

— Ah ! cher docteur, si vous m’abandonniez, que deviendrais-je ? Je mourrais, bien sûr. En dehors de ces bonnes heures que vous me consacrez si généreusement, que me reste-t-il ? Les apitoiements des