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qualification du voyageur anglais[1]. Cette vallée est, sans doute, avec les réserves de Lepa, la région la mieux appropriée à un grand établissement d’élevage. Nous la trouvons peuplée de bestiaux ; et après nous être fourni de viande dans les maisons de l’estancia (610 m.), nous traversons les coteaux d’origine volcanique qui séparent la vallée de Lelej de la vallée de Lepa où l’énorme quantité de détritus glaciaires indique que les roches de ceux de l’occident consistent surtout en granits, porphyres et andésites ; on ne voit pas de morceaux schisteux.

La vallée de Lepa est aussi belle que celle de Lelej ; nous y passâmes la nuit (740 m.) ; la rivière sort d’une gorge pittoresque, profonde entaille dans la roche gris-claire, d’aspect granitique à distance ; et elle reçoit les eaux de l’Arileufu, cours d’eau moins important qui descend du sud-ouest (760 m.).

Tout le terrain est ondulé par les glaces ; les hauteurs de l’est sont recouvertes de roches volcaniques, mais les dépressions et les plateaux qui se prolongent au sud entre les chaînes de l’ouest, et les hauts coteaux de l’orient, traversées par les mêmes rivières transversales que nous franchissons, sont formées de roches sedimentaires, probablement de miocène, à en juger par quelques mollusques lacustres que j’ai trouvés à Pichileufu (790 m.). Le Mayuleufu, auquel s’unit le Pichileufu, a un lit profond et court au sud, à travers une vallée étroite et pierreuse jusqu’au point où il reçoit le tribut des eaux du premier ; il était à sec à l’époque de notre passage. Dans les dépressions recouvertes de forêts, on trouve des blocs erratiques de deux cents mètres cubes dont la roche est un conglomérat volcanique. Après avoir dépassé le vallon encaissé du Temenhuao ou Tameñao, comme on l’appelle généralement, nous entrons dans ce que l’on peut considérer comme les pampas d’Esguel, proprement dites, succession de petits plateaux (780 m.), coteaux et marécages, entièrement habillés de vert, dont l’altitude varié de 700 à 800 mètres au-dessus de la mer, et qui s’étendent entre les versants des montagnes au couchant, et le haut plateau (970 m.) couronné de laves au levant. Au pied de ce plateau, au fond de la plus grande dépression, se trouvent trois lagunes sans issue où viennent se perdre des ruisseaux qui sourdent de la montagne opposée. Il s’agit, sans doute, du lit d’un ancien lac disparu dont il ne reste que les lagunes (740 m.). Il n’y a pas un mètre de terre stérile ; l’herbage recouvre tout ; et sur les petites éminences formées par

  1. G. C. Musters : At home with the Patagonians. Londres, 1871.