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du grand toldo de Ñancucheo, le brave cacique de valeur proverbiale, quand il reçut la visite du marchand d’eau-de-vie, l’araucan rusé qui évoqua, en un discours de trois jours, toute l’histoire de sa race, pour finir par recommander la liqueur dégoûtante qu’il vendait et qui l’a anéantie[1].

Je crois que toutes ces terres appartiennent encore heureusement à l’État, qui doit les faire étudier par des hommes consciencieux, et les coloniser ensuite avec la certitude d’un succès rapide et d’un bon revenu pour le trésor.

La large vallée du Malleco (730 m.) forme de vastes pâturages vers l’occident où la rivière de ce nom recueille les eaux de la lagune du Tromen (950 m.) située immédiatement au nord du Lanin qui donne aussi naissance à des tributaires du Malleco, et les sépare de ceux du lac Huechu-Lafquen (830 m.), situé sur son versant sud. Les collines voisines transversales qui séparent la vallée du Malleco dans son cours supérieur, et celle de Chimehuin, sont recouvertes d’herbes et de bois, mais les pehuenes diminuent et disparaissent en arrivant au Chimehuin supérieur. L’ancien chemin indigène entre les campements de Caleufu (cacique Shaihueque), Collon-Cura (cacique Molfinqueupu) et Pungechaf ou Malleco (cacique Ñancucheo) suit les eaux de la rivière Palihué par la pampa de ce nom, et bientôt pénètre dans les gorges qui communiquent avec la profonde vallée du Collon-Cura, traversant ainsi les chaînes volcaniques à l’est du Chimehuin, dont les sommets les plus visibles sont celui de Tantan et celui de Los Perros ; mais j’ai pris plus à l’occident, entre le Tantan et le Cerro Trinque (1080 m.) jusqu’à tomber dans la belle vallée du Chimehuin. À une époque antérieure, toute la région a été recouverte par les glaciers, à en juger par les détritus qui jonchent le sol. À midi, nous fîmes notre entrée à Junin de los Andes (750 m.), situé à l’angle formé par le rio, modifiant la direction qu’il suivait depuis son point de départ au débouché du lac Huechu-Lafquen, pour contourner la basse chaîne orientale, et dévier au pied du Cerro del Perro vers le rio Collon-Cura. Il y a plusieurs années que j’ai fait la connaissance de cette belle plaine, pendant des chasses aux autruches avec Ñancucheo et son hôte le cacique Quinchauala, et par conséquent je n’ignorais point quel beau centre d’activité elle pourrait devenir un jour, une fois le nomade soumis ou délogé ; je ne fus donc pas trop surpris de me

  1. Viaje a la Patagonia Septentrional, Buenos Aires, 1879.