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recouvertes de troncs déjà desséchés. Les cyprès et les mélèzes constituent les espèces les plus communes de ces forêts.

Le 22, Lange laissa la plus grande partie de la charge dans l’Estrechura, et, avec deux charges plus légères, il suivit le chemin ouvert par les aides les jours précédents jusqu’à un petit cours d’eau qui se jette dans l’extrémité nord du nouveau lac ; mais il ne tarda pas à se convaincre qu’il était impossible de suivre ce chemin avec des bêtes de somme, car les eaux du lac arrivent jusqu’au pied des monts dont les versants sont très rapides, sans laisser de plage. Il résolut alors de continuer la route a pied, en emportant des vivres pour dix jours, ainsi que les instruments indispensables ; et se partagea cette charge avec un de ses aides.

Ce fut le 23, à midi, qu’ils commencèrent cette marche pénible ; le mont surplombait à pic le lac, et les explorateurs se trouvèrent souvent dans la nécessité de s’aider des pieds et des mains pour ne pas être précipités du haut des rochers. La marche jusqu’au 25 se fit par monts et vaux prés du lac dont la longueur approximative est de quinze kilomètres, et auquel a été donné le nom de l’illustre Rivadavia, déjà porté par la chaîne de l’est. La marche fut très pénible au milieu de ce bois touffu ; les jonchaies, les vieux troncs entassés parfois sur une épaisseur de vingt mètres en augmentaient la fatigue et les dangers ; les explorateurs devaient parfois se maintenir en équilibre sur les troncs tombés ; d’autres fois, ils devaient se glisser au-dessous et tombaient dans les fossés cachés par les broussailles, pénétrant jusqu’au cou dans les eaux du lac pour grimper de nouveau sur les rochers isolés, au milieu de roseaux mobiles et tranchants.

Après avoir dépassé le lac, on rencontre, au pied des montagnes de l’est, une plaine marécageuse parcourue par le Fta-Leufu ; la marche devint plus facile jusqu’à la sortie du fleuve ; d’abord tranquille, il présente bientôt après des rapides par suite de la différence de niveau existant entre le cours supérieur du fleuve et la partie inférieure de la vallée 16 de Octubre ; cette différence est de deux cents mètres. Les eaux qui sont très limpides, et conservent la même couleur vert-clair, se détournent à l’ouest, en coulant au pied de monts à pic. À sa sortie, la largeur du fleuve est de trente mètres ; elle augmente ensuite et en atteint cinquante. Au milieu de la rive du lac se jette un grand fleuve qui descend de l’ouest par une vallée ouverte et prolongée dans le fond de laquelle on aperçoit des hauteurs neigeuses.