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partir pour Lévis, de s’embarquer sur le « Stanley » de se réveiller le lendemain, à bord du « Sardinian », en route pour l’Afrique, et finalement d’être recueilli sur le « City of Lisbon. »

Tout le temps qu’il avait parlé, le Dean, assis aux côtés de l’évêque, l’avait dévoré des yeux. De son côté, Dolbret ne pouvait parvenir à en détacher son regard. « J’ai vu ce visage-là quelque part, se disait-il. » Il resta songeur jusqu’à la fin du dîner. N’y pouvant plus tenir, il sortit ; sur le pont il rencontra Miss Mortimer qui l’invita à marcher. Il accepta, mais sa conversation manquait de suite, sa pensée était ailleurs ; l’œil du Dean le poursuivait sans qu’il parvînt à se rappeler à quel visage il pouvait bien appartenir. Cette obsession finit cependant par s’en aller et Pierre fut bientôt tout au charme d’un tête-à-tête depuis longtemps désiré. Même le personnage du Dean lui devint presque indifférent, du moins pour un moment. Miss Mortimer et lui étaient assis côte à côte, sur de longues chaises. Tout à coup, le Dean passa devant eux.

— Ne trouvez-vous pas, dit Mlle Mortimer, que cet homme a un regard étrange ?

— Pas plus étrange que le vôtre, mademoiselle.

Berthe partit d’un grand éclat de rire :

— Vraiment, c’est un mince compliment à me faire.

— Mais non, c’est un avantage que d’avoir des yeux étranges.

— Peut-être, mais pas comme ceux du Dean.

Pierre suivait sa pensée :

…Avoir des yeux étranges, cela vous donne tout de suite une puissance invincible ; des yeux étranges sont une arme, ils vous font craindre, ils