secret, l’Italien n’avait plus besoin de son poignard pour se venger de José ; il n’avait qu’à s’adresser aux autorités militaires de Cape-Town et à faire arrêter son ennemi. C’est ce qu’il fit, de connivence avec Horner. Une fois arrêté, P’tit-homme fut envoyé à Cape-Town, où on le gracia, à condition qu’il s’enrôlât dans un des nombreux bataillons décimés de l’armée anglaise. C’est pourquoi je l’ai retrouvé à Halscopje, sous la tunique de kaki.
Hier j’allai à l’hôpital me renseigner auprès des ambulanciers sur les moyens à prendre pour faire ramener le corps de John en Amérique. Je passais dans une salle de blessés en compagnie d’un des médecins, quand j’entendis une voix mourante qui disait : « Ah la bonne femme, la bonne femme, comme t’es loin ! » Je m’approchai du lit d’où venait cette plainte, et je vis mon pauvre P’tit homme au mains d’un chirurgien qui travaillait à lui extraire une balle du bras. Il avait plusieurs autres blessures, et on me dit qu’il n’en avait pas pour deux heures à vivre. J’étais navré. Le pauvre blessé me reconnut ; en me voyant, malgré ses souffrances, il eut la force de me dire :
— Terrinée ! docteur, j’avais peur de mourir sans voir personne de chez nous.
— Comment se fait il que tu sois ici ? lui demandais-je.
— Je vais vous raconter ça, si vous voulez ôter un peu ce bandage qui me gêne pour parler.
Je fis ce qu’il demandait, il continua :
Imaginez-vous que j’étais à Paardeberg. Ce sont les Canadiens et les hommes de deux régiments anglais qui ont décidé le sort de la bataille. Moi, j’étais enrôlé dans les Gordons depuis la