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pourvu que ses amis restassent dans le voisinage encore une demi-heure, il aurait peut-être la vie sauve.

Peu à peu la tranquillité lui revint et il se reprit à converser.

— Dites donc, mon ami, voulez-vous essayer de savoir d’où vient ce cri de hibou ; Ce n’est pas gai, quand on va mourir, d’entendre ainsi chanter son libéra.

Le soldat mit le nez à la porte. À peine avait-il tourné le dos que Dolbret sortit de sa poche une petite fiole qu’il agita violemment et dont il versa le contenu dans le verre. Comme il se rasseyait, le Tommy rentrait. Il s’arrêta tout surpris devant lui et lui demanda :

— Êtes-vous malade ?

— Pas le moins du monde ; est-ce que j’en ai l’air ?

— Vous avez le visage tout bouleversé, les veines de vos tempes sont gonflées et battent.

— Je vous avoue que l’idée d’être pendu ne me sourit pas.

— Pauvre homme !

— Ne me plaignez pas ; je vais finir par me faire à l’idée de mettre à mon cou l’ultime et péremptoire cravate qui s’appelle la corde. Pourtant les rêves d’élégance de ma jeunesse n’étaient pas de ce genre. Enfin, après tout, ou n’est pas maître de sa destinée : l’homme s’expose et Dieu dispose, comme dit l’autre.

Comme on le voit, Dolbret redevenait lui-même ; une lueur d’espoir avait suffi pour le faire renaître à sa vraie vie, pour lui faire retrouver presque sa gaîté. Il demanda :