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pression de ses traits, le silence, la sévérité du lieu, les habitudes tranquilles des pieuses filles, tout cela avait déjà comme reculé d’un pas l’abandon que mettait la jeune fille dans ses entretiens avec Dolbret, durant les derniers quinze jours passés sur le « City of Lisbon ». Maintenant elle semblait avoir peur, elle avait l’air de regarder le chemin avant d’y poser le pied. Pierre le comprit et ce fut avec une émotion dans la voix qu’il lui dit :

— Berthe, il y a bien longtemps que je vous ai vue.

Elle lui donna sa main sans parler et sans le regarder. Puis s’étant assise, elle demanda :

— Et vous n’êtes pas allé défendre Walter Mortimer, mon oncle ?

— Non, pas encore. Nous partons ce soir. Je comprends que ma présence ici vous étonne. Vous avez cru qu’au lieu de courir où mon devoir m’appelle, je venais chercher le bonheur près de vous. Je comprends votre étonnement et je souffre d’en avoir été la cause. Rassurez-vous, je n’ai pas faibli et si je suis ici en ce moment, c’est dans votre intérêt le plus cher.

— Je n’ai pas douté de votre courage un instant, croyez-moi.

— Merci alors ; je suis content de m’être trompé. Laissez-moi vous expliquer comment il se fait que je ne sois pas encore parti. Nous devions prendre le train, mes amis et moi, hier, durant la nuit. Nous sommes partis trop tard. Ce matin, au moment où nous arrivions à la gare, le train a été contremandé : on venait de recevoir une dépêche de Chieveley ordonnant de ne pas le laisser partir, parce que Dewet était signalé dans les environs.