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— Madame, je vous remercie.

— Ne m’interrompez pas, s’il vous plaît. Je vous ai fait une faveur. Quand je dis une faveur, je sais ce que je dis.

— Madame…

— Car je ne permets jamais qu’on me dérange pendant que Minnie me coiffe. Entendez-vous, Minnie, comprenez-vous Minnie, je ne permets jamais qu’on me dérange pendant que vous me coiffez. Souvenez-vous de cela à l’avenir.

Cette phrase avait été péniblement prononcée.

— Non, je ne permets jamais qu’on me dérange, car ma coiffure, c’est ma vie.

— Madame, je regrette…

— C’est ma vie ; je ne change jamais ma coiffure. jamais ; je mourrai coiffée comme je le suis en ce moment. Regardez, monsieur. Minnie, soutenez-moi.

La bonne la souleva et le visiteur eut toutes les peines du monde à ne pas s’éclater de rire en voyant l’échafaudage dont était couronnée la tête de la vieille dame. Les cheveux blancs, tirés de chaque côté de la tête, étaient remontés vers le sommet où ils s’amoncelaient en une touffe de six ou sept pouces de hauteur ; par-dessus le tout s’étalait un nœud de velours cramoisi. En se retournant, supportée par Minnie, la vieille dame fit osciller le chef-d’œuvre ; on aurait dit une tête de coq qui picote. Elle se rassit et continua :

— Cette coiffure est unique.

« Je le crois bien, » se dit l’étranger.

— Elle date de 1847, époque à laquelle j’eus l’honneur insigne d’être présentée à sa Majesté la reine Victoria, avec mon mari, Sir George, Ri-