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LIVRE I.

grands et plus robustes. Mais n’est-il pas dommage de voir des hommes forts et beaux (car les nobles choisissent les victimes de leur corruption), de les voir se consumer dans l’inaction, s’amollir dans des occupations de femmes, tandis qu’on pourrait les rendre laborieux et utiles, en leur donnant un métier honorable, et en les habituant à vivre du travail de leurs mains ?

« De quelque manière que j’envisage la question, cette foule immense de gens oisifs me paraît inutile au pays, même dans l’hypothèse d’une guerre, que vous pourrez au reste éviter toutes les fois que vous le voudrez. Elle est, en outre, le fléau de la paix ; et la paix vaut bien qu’on s’occupe d’elle autant que de la guerre.

« La noblesse et la valetaille ne sont pas les seules causes des brigandages qui vous désolent ; il en est une autre exclusivement particulière à votre île.

— « Et quelle est-elle ? dit le cardinal.

— « Les troupeaux innombrables de mou-