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SOUVENIRS

Nous rentrons le lendemain par Coutances et Bayeux. Un crochet vers Trouville et Deauville où l’on nous a gentiment conviés. Plages renommées, remuantes, pleines de couleur et d’entrain, agitées des mêmes problématiques élans vers le repos. L’une, bon enfant, populaire, où l’on profite du petit trou pas cher — ou pas trop —, où les jeux sont faits sur un ton modeste. L’autre, cossue, rendez-vous des aristocraties de notre temps démantelé : mode, courses, roulette, villas huppées, casino tapageur. Toutes les grandes plages du monde ne sont-elles pas ainsi divisées entre un peuple bruyant et l’homme installé, préoccupé de parade ?

Nous reprenons la route. Après Lisieux, Mantes-la-Jolie, le profil de Rolleboise — et Paris.

***

Je reprends le chemin de la Sorbonne, non sans inquiétude. Ces trois semaines d’évasion me vaudraient-elles des défections de la part des auditeurs ? Les exigences de la vie, avec ce qu’elles comportent d’abandon, ne les détourneraient-elles pas de ce rendez-vous hebdomadaire auquel rien ne les engageait, qu’une curiosité facile à épuiser ? Des collègues français m’ont prévenu : après Pâques, l’assistance diminue généralement de moitié. Eh bien ! non. Jusqu’à la fin, le public se montre d’une émouvante fidélité.

Très sensible et d’une flexibilité extrême, il est pris par son propre mirage. La France et le Canada français communient dans un même élan de vitalité.

On prête ce propos à Sacha Guitry : « Ce qui est embêtant dans les Mémoires et les Souvenirs,