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presque terrible, passionnée de réserve, douée d’un esprit au fourreau, qui en sort soudain comme une épée à couper son homme en deux du premier coup. Une de ses nièces disait : « Chez ma tante, il n’y a pas d’opinions, tout est principe ». Dieu semble l’avoir mise au monde pour prouver qu’il peut aussi créer des anges de fer. Avec cela, aimable et aimée au possible. Elle est née aïeule, et elle reste jeune fille à cinquante ans. Elle a été très belle, et elle a dû n’inspirer que des passions de respect. C’est Minerve, mais chrétienne… C’est par elle que la mère François a terminé ses créations artistiques commencées par le garçon que vous connaissez. Il y avait du fantasque dans les idées de cette digne femme sans usage et sans littérature »[1].

C’est à Elise que Veuillot écrivait, en 1874 : « Le bon Dieu m’a donné l’Église, toi et Eugène, et j’ai été un homme bien outillé »[2]. Si Veuillot connut d’autres affections qui, presque toutes, se sont brisées prématurément, il eut du moins cette consolation : l’amitié constante et dévouée de son frère. Il l’avait retrouvé à Bercy, où ils jouèrent enfants, et où se lia leur vie. Je ne sais rien de plus touchant, de plus émouvant, que ces pages des

  1. Lettre à madame Léontine Fay Volnys : Revue des Deux-Mondes, 15 août 1913, pp. 868-9.
  2. Correspondance, III, 240.