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les classiques. Il lit Corneille, Boileau et madame de Sévigné, et ces trois influences expliqueraient la tournure de son talent littéraire. Il admire Racine et Molière — Molière à qui il s’en prendra plus tard — ; La Bruyère et La Fontaine ; Pascal, La Rochefoucauld, Saint-Simon, Vauvenargues, Rabelais et Montaigne, qui tous l’intéressent à des degrés divers. Il néglige, ou à peu près, le dix-huitième siècle. Déjà dans la mêlée, il s’arme de toutes ces pensées ; le reste viendra de son naturel.

Au Mémorial de la Dordogne[1], il traite tour à tour et avec aisance de politique, d’histoire et de littérature. Au premier contact des personnes et des choses, son esprit étincelle. Il connaît à peine son métier qu’il le possède déjà. Dès ses premiers essais, il combat. Il est un adversaire redoutable, spirituel et mordant, qui démasque avec force et sans merci la sottise et la suffisance. Ses polémiques ont du retentissement. Elles font la joie de la ville où Veuillot compte de nombreux amis. Sa renommée grandit ; et lorsque se fonde la Charte de 1830, journal à la dévotion de M. Guizot, le jeune directeur est mandé à Paris comme rédacteur politique.

Cette fois, c’est le succès. Il est venu à Paris en conquérant, plein d’une orgueilleuse confiance. Il croit à son avenir politique : il veut être ministre.

  1. Ça et Là, p 426, vol II : Confession littéraire.