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la courbe romane lui plaît. Il ne croit plus, mais il s’abandonne au souvenir qui remue encore son âme, restée jeune : rythmes lointains, gestes oubliés, impressions perdues qui renaissent soudain dans ce cadre immuable, où flotte de l’encens. Église silencieuse, où s’attarde son regard distrait, où, dans l’ombre qui monte doucement, de très vieilles statues posent l’immobilité de leurs attitudes recueillies. Il va sortir, quand il aperçoit une jeune fille vêtue de blanc et qui prie. Cette vision l’arrête, l’envahit : cette piété sans pose le fait communier en l’infini de la pureté : « Elle restait immobile sur sa chaise, seules ses lèvres tremblaient en disant les Ave, et ses doigts faisaient glisser, grain à grain, le chapelet dont la petite croix d’argent se balançait et brillait sur sa robe. Tout immobile qu’elle était, jamais je n’ai vu personne qui parût vivre plus intensément, mais d’une vie purement spirituelle, — et je crois à l’âme depuis que j’ai vu ce regard fixé sur l’éternité. »

Louise est la fille de Lorgeril. Ce dernier, excellent cœur, mais un peu mou, hésitant. À la maison, ce représentant du peuple, ce manieur d’hommes, abdique. Il gâte sa fille, qui lui ressemble physiquement et qui l’aime à cause de sa bonté timide. Douce, compatissante, sans rien de la raideur puritaine et sèche de sa mère, Louise grandit dans une moitié d’obéissance, gardant la liberté de suivre