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Strabon, qui rend raison de l’ignorance où l’on étoit des pays qui sont entre l’Hypanis & le Gange, dit que, parmi les navigateurs qui vont de l’Égypte aux Indes, il y en a peu qui aillent jusqu’au Gange. Effectivement, on voit que les flottes n’y alloient pas ; elles alloient, par les mouçons de l’ouest à l’est, de l’embouchure de la mer Rouge à la côte de Malabar. Elles s’arrêtoient dans les étapes qui y étoient, & n’alloient point faire le tour de la presqu’isle deçà le Gange par le cap de Comorin & de la côte de Coromandel. Le plan de la navigation des rois d’Égypte & des Romains étoit de revenir la même année[1].

Ainsi il s’en faut bien que le commerce des Grecs & des Romains aux Indes ait été aussi étendu que le nôtre ; nous qui connoissons des pays immenses qu’ils ne connoissoient pas ; nous qui faisons notre commerce avec toutes les nations Indiennes, & qui commerçons même pour elles & navigeons pour elles.

Mais ils faisoient ce commerce avec plus de facilité la côte du Guzarat & du Malabar ; & que, sans aller chercher les isles du midi, on se contentât des marchandises que les insulaires viendroient apporter, il faudroit préférer la route de l’Égypte à celle du cap de Bonne-Espérance. Strabon[2] dit que l’on négocioit ainsi avec les peuples de la Taprobane.


CHAPITRE X.

Du tour de l’Afrique.


ON trouve, dans l’histoire, qu’avant la découverte de la boussole, on tenta quatre fois de faire le tour de

  1. Ibid.
  2. Liv. XV.