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testament qu’on ne pourra ouvrir qu’après un certain temps. Voilà des craintes & des précautions inconnues aux premiers Romains.


CHAPITRE XXV.

Continuation du même sujet.


LA loi Romaine donnoit la liberté de se faire des dons avant le mariage ; après le mariage elle ne le permettoit plus. Cela étoit fondé sur les mœurs des Romains, qui n’étoient portés au mariage que par la fragilité, la simplicité & la modestie ; mais qui pouvoient se laisser séduire par les soins domestiques, les complaisances & le bonheur de toute une vie.

La loi des Wisigoths[1] vouloit que l’époux ne pût donner à celle qu’il devoit épouser au-delà du dixieme de ses biens ; & qu’il ne pût lui rien donner la premiere année de son mariage. Cela venoit encore des mœurs du pays : les législateurs vouloient arrêter cette jactance Espagnole, uniquement portée à faire des libéralités excessives dans une action d’éclat.

Les Romains, par leurs loix, arrêterent quelques inconveniens de l’empire du monde le plus durable, qui est celui de la vertu : les Espagnols, par les leurs, vouloient empêcher les mauvais effets de la tyrannie du monde la plus fragile, qui est celle de la beauté.


  1. Liv. III, tit. 1, §. 5.