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sisteroit à l’inconstance du temps. Mais, pour cela, un état où il n’y auroit point de liberté, & ou les magistrats seroient indépendans du peuple, soit quant à leur élection, soit quant à leur conduite, seroit-il une république ? Un état où le prince pourroit tout ce qu’il voudroit, où aucun frein n’arrêteroit ceux qu’il chargeroit de l’exécution de ses caprices, où l’on chercheroit à l’envi à s’en rendre l’agent aveugle par l’espoir des récompenses ; un tel état seroit-il une monarchie ? enfin seroit-ce un despote que celui qui ne pourroit pas tout ce qu’il voudroit, & dont on pourroit examiner & discuter les volontés ?

Au surplus, en lisant la Défense de l’Esprit des loix, on verra que cet annotateur ne connoît pas cet ouvrage, ou n’a pas voulu le connoître. Il y auroit appris à ne pas faire un crime à M. de Montesquieu d’employer les mots vertu & honneur, comme il les emploie. Il y auroit appris que l’auteur ne s’en est servi qu’après les avoir définis : il y auroit appris que, quand un écrivain a défini un mot dans son ouvrage, quand il a donné son dictionnaire, il faut entendre ses paroles suivant la signification qu’il leur a donnée. C’est cependant d’après cette équivoque, que l’auteur des notes a fait, à M. de Montesquieu, plusieurs reproches qui, sans être exprimés sur le ton que M. Crévier a choisi, ne laissent pas de produire le même effet.