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LETTRES FAMILIÈRES.


de Guasco me barbouille toute cette histoire : il me dit que c’est M. de Révol, conseiller au parlement, qui a donné le manuscrit, qui est, dit-il, très-savant. C’est depuis qu’il a une dignité dans le chapitre de Tournai qu’il ne sait ce qu’il dit. Je vous prie, Madame, de vouloir bien remercier M. d’Alembert de la mention qu’il a faite de moi dans sa préface [1]. Je lui dois encore un remerciment pour avoir fait cette préface si belle : je la lirai à mon arrivée à Bordeaux. Agréez, je vous prie, etc.


Clérac en Agénois, 15 juillet [1751].


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LETTRE CVIII.


A LA MÊME.


Vous dites, Madame, que rien n’est heureux, depuis l’ange jusqu’à l’huître : il faut distinguer. Les séraphins ne sont point heureux, ils sont trop sublimes : ils sont comme Voltaire et Maupertuis, et je suis persuadé qu’ils se font là-haut de mauvaises affaires ; mais vous ne pouvez douter que les chérubins ne soient très-heureux. L’huître n’est pas si malheureuse que nous, on l’avale sans qu’elle s’en doute ; mais pour nous, on vient nous dire que nous allons être avalés, et on nous fait toucher au doigt et à l’œil que nous serons digérés éternellement. Je pourrois parler à vous, qui êtes gourmande, de ces créatures qui ont trois estomacs : ce seroit bien le diable si dans ces trois il n’y en avoit

  1. Discours préliminaire de l’Encyclopédie, paru en 1731.