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LETTRES FAMILIÈRES.


arrangements à prendre avec ce pays-ci ; et M. le cardinal Valenti, par qui j’ai fait passer ces représentations au pape, étant fort bien disposé, ainsi que Sa Sainteté, j’ai obtenu ordre à la congrégation de ne pas proposer le livre, s’il n’étoit déjà mis sur la liste des livres à juger, qu’on intime avant la congrégation ; ou, s’il y était, et qu’en conséquence il fallut nécessairement qu’il fût examiné, défense de rien statuer.

Nous avons été dans le dernier cas, et je crois que le résultat de ce premier examen sera de nommer un nouvel examinateur.

Je ne dois pas vous dissimuler que dans la congrégation tous les avis n’ont pas été favorables ; mais vous avez un avocat dont le suffrage est considérable à tous égards : c’est le cardinal Querini, préfet de la congrégation de l'Index, de qui sûrement vous connoissez la vaste érudition. Il ne put pas aller à la congrégation ; mais il n’a point caché que, s’il y eût été, il eût opiné en votre faveur, et qu’il avait été satisfait de votre réponse imprimée [1]. Je fais de mon mieux pour l’entretenir dans ces sentiments favorables, qui peuvent vous être fort utiles, cette Excellence étant fort en état de défendre son opinion et de l’autoriser même auprès des autres juges.

Malgré cela, je suis fort éloigné d’oser vous répondre de rien ; ce que je sais, c’est qu’il est fort apparent ici qu’on ne se fût jamais avisé de soi-même de vouloir censurer votre ouvrage, si l’on n’y eût été excité d’ailleurs ; et sans avoir de connoissance précise là-dessus, mon opinion et celle de plusieurs gens éclairés est que la dénonciation est venue de la France.

  1. La Défense de l’Esprit des Lois.