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MONTESQUIEU

ET LA CENSURE [1].

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La censure était une institution dont les ministres se servaient quelquefois pour se défendre eux-mêmes, mais qui avait pour but de protéger les principes sociaux contre la licence de la presse . Il y en avait de deux sortes : l'une s’exerçait sur les livres imprimés en France, l’autre sur les livres qui, imprimés hors de France, voulaient y circuler.

Le grand moyen des censeurs était d’obliger les auteurs à mettre des cartons à leurs ouvrages. Les cartons sont des feuillets substitués à d’autres qui contenaient des phrases contraires au gouvernement, à la morale, à quelque chose ou à quelqu’un qui veut être respecté.

L’esprit des écrivains s’est souvent affiné contre ces exigences de l’autorité, loin de s’amoindrir ; néanmoins les textes primitifs sont curieux à connaître ; et on comprend la valeur vénale et littéraire qui s’attache aux volumes qui les contiennent.

  1. M. Vian, qui a fait des recherches si curieuses et si fécondes sur Montesquieu veut bien nous communiquer cet article. On y verra que, contrairement à l’opinion reçue, les cartons de l'Esprit des Lois n’ont que peu d’importance. Il est vrai que dans un gouvernement où l'on n’a point la liberté de la presse, le moindre bruit se fait entendre au milieu du silence général, et suffit pour effrayer des ministres qui ne craignent rien tant que le réveil de l’opinion.