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DE L’ESPRIT DES LOIS.


n’auroit-il pas donné à ces mots, « ce qui marque en Dieu un défaut de sagesse et un manque de puissance » ? Que n’auroit-il pas dit sur cette association des gazetiers avec Bayle, des défenseurs de la religion avec le destructeur de toute vérité ?

Il a laissé ces petits artifices à ses adversaires ; il a gardé le silence : étoit-il besoin de le rompre pour dire ce que tout le monde sait, qu’il y a moins de défauts dans l’univers physique que dans le moral, parce que les êtres moraux, libres par leur nature, agents vicieux par le mauvais usage de leur liberté, diffèrent essentiellement des êtres physiques, qui sont purement passifs, et par conséquent incapables de troubler l'ordre établi, et de sortir des lois générales que leur auteur a prescrites ?

« Nous avons reproché à l’auteur d’avoir dit : que la vertu n’est point le principe du gouvernement monarchique. Point de réponse. »

Habemus confitentem reum, pouvoient ajouter les gazetiers : son silence prouve qu’il a eu tort d’avancer un fait notoirement vrai. Il devoit dire que l’honneur étoit le principe des républiques, et la vertu le ressort des monarchies. Qu’y auroit-il eu de plus aisé que d’accorder ensuite l’histoire du monde avec cette hypothèse-là ?

« Dans les monarchies, la politique fait faire les grandes choses avec le moins de vertu qu’elle peut. »

Quel blasphème ! analyser le gouvernement monarchique, n’est-ce pas détruire, renverser, anéantir la religion ? Attribuer les grandes choses à la politique, n’est-ce pas en ravir la gloire à la grâce ? n’est-ce pas insulter un Dieu jaloux ?

« Les lois tiennent la place de toutes ces vertus hé-