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DÉFENSE


pensées. Je ne sais pas un mot de ce que vous dites ; mais j’entends très-bien ce que vous ne dites pas. »

Entrons à présent en matière.


DES CONSEILS DE RELIGION.


L’auteur, dans le Livre sur la religion, a combattu l'erreur de Bayle ; voici ses paroles [1] : « M. Bayle, après avoir insulté toutes les religions, flétrit la religion chrétienne. Il ose avancer que de véritables chrétiens ne formeroient pas un État qui pût subsister. Pourquoi non ? Ce seroient des citoyens infiniment éclairés sur leurs devoirs, et qui auroient un très-grand zèle pour les remplir. Ils sentiroient très-bien les droits de la défense naturelle. Plus ils croiroient devoir à la religion, plus ils penseraient devoir à la patrie. Les principes du christianisme, bien gravés dans le cœur, seroient infiniment plus forts que ce faux honneur des monarchies, ces vertus humaines des républiques, et cette crainte servile des États despotiques. »

« Il est étonnant que ce grand homme n’ait pas su distinguer les ordres pour l’établissement du christianisme, d’avec le christianisme même ; et qu’on puisse lui imputer d’avoir méconnu l’esprit de sa propre religion. Lorsque le législateur, au lieu de donner des lois, a donné des conseils ; c’est qu’il a vu que ses conseils, s’ils étoient ordonnés comme des lois, seroient contraires à l’esprit de ses lois. »

Qu’a-t-on fait pour ôter à l’auteur la gloire d'a-

  1. Liv. XXIV, ch. VI.